Un book-test pas comme les autres !
S’il est un personnage fascinant dans le microcosme des magiciens français et plus précisément bretons, pour ne pas dire finistériens, c’est bien Fanch Guillemin, notre cher « professeur Fanch » !
Professeur autoproclamé ? Pas du tout : Fanch a inlassablement enseigné son savoir aux quatre coins du monde dans le cadre de la grande maison de l’Education Nationale afin de promouvoir la langue et la culture françaises dans les contrées les plus reculées. Esprit facétieux s’il en est, cela ne l’a pas empêché de publier un iconoclaste manuel d’antisèches intitulé « l’art de tricher en classe » : un bon programme scolaire, et surtout une bonne introduction à l’art de la magie ! Même les sous-doués, à jamais incarnés par Gaëtan Bloom, se sont inspirés de ce petit brûlot.
Digne héritier de ses ancêtres celtes, Fanch a été un grand voyageur et un vrai explorateur. On le savait à la lecture des « Sorciers du bout du monde », mais on n’imaginait peut-être pas à quel point son itinérance a nécessité de l’endurance, du courage et aussi d’un peu de chance. Il fallait l’énergie de la passion pour affronter les situations inattendues qui sont l’apanage de l’Aventure.
Avec les cinq nouvelles récemment éditées par « Marchand de trucs », c’est sous une forme légèrement romancée que Fanch nous fait partager quelques unes des péripéties qu’il a connues au Costa-Rica, à Panama, en Algérie, en Côte d’Ivoire, au Canada, et dans bien d’autres contrées… On les découvre à l’aide d’une riche iconographie (pas moins de 150 photos !) qui ne manque pas de surprendre. A première vue, la lecture pourrait paraître difficile et éloignée de nos curiosités magiques. A y regarder de plus près, c’est tout le contraire.
Tout d’abord les cinq récits méritent le plus grand intérêt quand on veut bien y consacrer toute son attention. En ce qui me concerne j’ai fait de beaux voyages en m’aidant de la magie d’internet et plus précisément de Google Map : quel bonheur de suivre les pérégrinations de Fanch en ayant sous les yeux les endroits précis qu’il a sillonnés. Avec cette lecture « assistée par ordinateur », on apprend plein d’informations, géographiques, historiques et ethnographiques.
Pour ceux qui ne sont pas curieux des nombreuses anecdotes et informations contenues dans ces récits, il ne faut pas manquer le dernier chapitre consacré aux « Secrets de la Magie Traditionnelle » : c’est un autre regard sur notre art, avec l’universel désir de rêve et de merveilleux qui nous est si cher. La physionomie des spectateurs du bout du monde ne trompe pas ; c’est la même joie mêlée de perplexité que celle de nos publics.
Enfin, même si cela ne parait pas être la vocation première du livre (ce qui paradoxalement en renforce l’intérêt !), il faut bien comprendre qu’il s’agit là d’un excellent « book-test » (Lee Earle dirait mieux un « word-test »). Fanch a été un pionnier en la matière pour les livres en français et même en espagnol. Il nous offre ici trois effets dont la révélation va crescendo de façon efficace et surprenante. C’est le book-test idéal à laisser traîner dans son salon : il attire l’attention de vos invités qui ne manquent pas de le feuilleter d’un air intrigué. « C’est quoi ce bouquin ? ». « Oh, c’est un magicien baroudeur qui raconte des trucs à peine croyables. Il est un peu sorcier sur les bords. Même la lecture du livre procure des pouvoirs fantastiques. Attends, je te montre… ». Et voilà : votre routine démarre avec l’ouvrage le plus crédible qui soit. Bref : le plus simple et le plus pratique des book-tests !
Fanch Guillemin nous fait ainsi partager sa vie d’évasion et de magie. Ce sera un plaisir de prolonger ses « aventures », en sa présence, grâce à l’exposition que Céline Noulin présentera au prochain Congrès FFAP à la Grande Motte. Hasta luego et kenavo !
Luc CAVÉ